L’arrivée de la loi du 11 février 2005 sur l’égalité des droits et des chances […] des personnes handicapées, a déclenché une petite révolution dans le monde du web. Petite, car le législateur a bien prévu une loi, mais aucun contrôle, aucun mode de sanction pour les contrevenants. Malgré tout, force est de constater que, du côté des administrations, le sujet a été pris au sérieux. Les équipes ont donc bien dû s’adapter à ces nouvelles contraintes projet, la plupart se révélant en fait productives de savoir et de rigueur. Car, pour construire un site accessible, il est important de comprendre pourquoi et comment on fait les choses. Comprendre comment les autres perçoivent le web, et comprendre comment fonctionnent les outils mis à notre disposition pour produire des contenus utilisables par tous. L’accessibilité est en réalité à la confluence de nombreuses problématiques qualité : ergonomie, esthétique, efficacité du code et des contenus.

Il existe deux référentiels d’accessibilité en France, tous deux basés sur les travaux du WAI (Web Accessibility Inititative), WCAG2 (Web Content Accessibility Guidelines).

Les Règles pour l’accessibilité des contenus Web (WCAG) 2.0 présentent un large éventail de recommandations pour rendre les contenus Web plus accessibles. Suivre ces règles rendra les contenus accessibles à une plus grande variété de personnes en situation de handicap, incluant les personnes aveugles et malvoyantes, les personnes sourdes et malentendantes, les personnes ayant des troubles d’apprentissage, des limitations cognitives, des limitations motrices, des limitations de la parole, de la photosensibilité et les personnes ayant une combinaison de ces limitations fonctionnelles. Suivre ces règles rendra aussi les contenus Web souvent plus faciles d’utilisation aux utilisateurs en général.
(source W3C)

WCAG est la norme internationale du W3C pour l’accessibilité des contenus du Web. Actuellement en v2.0, cette norme est reconnue officiellement par la Commission Européenne qui en recommande l’adoption dans tous les pays membres de la communauté. L’administration française s’y réfère depuis 1999.

Le premier référentiel, Accessiweb (actuellement en version « HTML5/ARIA »), a été rédigé à l’initiative de l’association Braillenet et comporte 13 thématiques composées chacune d’une série de critères. Chaque critère Accessiweb affiche une correspondance vers un ou plusieurs critères de succès des WCAG 2.0, vers une ou plusieurs techniques des WCAG 2.0 et vers un ou plusieurs tests du RGAA (Référentiel Général d’Accessibilité pour les Administrations, cf. ci-dessous). La validation d’un critère Accessiweb permet de valider le ou les critères RGAA associés.

Le second référentiel, RGAA (actuellement en v3), est destiné à définir, en France, les modalités techniques d’accessibilité des services en ligne de l’État, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent, pour les trois canaux du Web, de la télévision et de la téléphonie.

Le RGAA découle de l’obligation d’accessibilité imposée par l’article 47 de la loi du 11 février 2005 pour « l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées », dont le décret d’application a été publié au Journal Officiel le 16 mai 2009. Il a été approuvé, pour le canal Web, en octobre 2009.

Quel référentiel pour quel type de projet ?

Voilà pour le côté historique. Du coup, avec ces deux référentiels peut se poser la question du choix. Même si, au final, l’accessibilité d’un site ne dépend pas du référentiel employé pour le concevoir ou l’auditer (vu que ces documents normatifs ne sont que des traductions techniques des WCAG), de ce  choix peut dépendre le type de compte-rendu et de certification proposés au client.

Chez Digiwin, le choix du référentiel va donc dépendre du type de projet :

  • Client « public » (administration, collectivité etc.), choix imposé : RGAA
  • Client « privé » : Accessiweb si demande de certification à la clef, sinon au choix du client

Impacts de l’accessibilité sur les projets

Dans le cadre d’un projet web, le niveau d’accessibilité requis peut aller de A (ou Bronze, chez Accessiweb 2.2) – pour les clients privés – à AA (Argent dans l’ancien référentiel Accessiweb), niveau minimal légal pour les administrations.

La différence entre A et AA est légère, autant pousser au niveau AA si le projet ne comporte pas de vidéo.

La gestion d’un projet accessible va demander des compétences spécifiques. La présence d’un expert Accessiweb ou d’une personne formée aux techniques de conception accessible est relativement incontournable. Digiwin a donc fait certifier, dès 2008, deux experts chez Accessiweb. Leur travail en interne consiste à former les équipes et sensibiliser les intervenants, depuis les équipes commerciales jusqu’aux designers.

Tout cela représente un coût. Par rapport à un projet « standard », il va falloir ajouter du temps de revue de code, d’audition du site avant la mise en production, des corrections et des aménagements spécifiques parfois complexes (surtout avec les CMS, modules JS et autres frameworks, rarement accessibles), l’accompagnement et la sensibilisation des équipes de contribution (client) et le suivi du projet dans son cycle de vie à long terme. Au niveau technique, l’intégration front-end est plus délicate et demande un intégrateur rigoureux, surtout pour les sites usant de fonctionnalités JS, de chargements asynchrones et de composants médias.

Phases d’accessibilité et rôles des intervenants

L’accessibilité intervient de manière transverse tout au long du projet. Plusieurs phases et de nombreux profils sont impactés :

  • Initialisation du projet : technico-commercial, architecte > Qualification du besoin et faisabilité.
  • Conception : architecte, chef de projet, ergonome/designer/graphiste > SFG, SFD, storyboarding, maquettage.
  • Développement : développeur, intégrateur > Gabarits, intégration HTML/CSS/JS, recette technique.
  • Exploitation : contributeur, chef de projet, développeur, designer > Corrections, évolutions, contributions.

À chacune de ces phases, l’expert en accessibilité accompagne le public concerné et remonte au CP les éventuelles difficultés rencontrées ou susceptibles de se présenter. Chez Digiwin, l’expert est aussi ergonome et intégrateur, ce qui permet de l’impliquer directement en amont et en aval du projet.

En avant-vente, les principes d’accessibilité doivent être abordés en proposant des solutions simples. L’idée de faire deux sites est à proscrire (tentation de proposer un site « accessible » simplifié en alternative au site vitrine), l’effort de maintenance et de conception d’une double publication étant supérieur à celui d’une conception unique accessible.

Les choix graphiques doivent être surveillés de près par l’expert car ils peuvent empêcher une validation et demander des travaux de retouche après intégration, donc une perte de temps coûteuse et des problématiques de re-validation auprès du client.

Tout au long du projet, le CP est le garant de l’accessibilité : il doit faire intervenir l’expert chaque fois que nécessaire et si possible en amont, afin d’éviter les corrections coûteuses. Avec l’expérience des projets accessibles engrangée ces dix dernières années, la plupart des chefs de projet ont acquis des réflexes qui leur permettent d’anticiper les difficultés et de proposer des solutions déjà éprouvées.

Et l’avenir ?

L’évolution rapide des technologies pose un défi important aux équipes, qui doivent se tenir informées. Les experts certifiés ont pour rôle d’effectuer une veille et de participer autant que possible aux échanges du GTA (Groupe de Travail sur l’Accessibilité) et aux séminaires organisés par l’association Braillenet. Cette veille est rendue plus complexe aujourd’hui avec la perte de vitesse d’Accessiweb et de la liste de diffusion du GTA. Un processus de suivi des certifications a néanmoins été mis en place chez Accessiweb autour de formations complémentaires. Elles permettent aux experts de revalider leurs compétences et de se tenir à jour sur les techniques liées à l’accessibilité numérique.

Le challenge de l’accessibilité a eu pour conséquence, chez Digiwin, de relever le niveau technique des équipes d’intégration et de développement. C’est pourquoi, même sur des projets qui ne mentionnent pas dans leur cahier des charges d’exigence particulière en matière d’accessibilité, la conception bénéficie désormais des apports liés à la montée en compétence des collaborateurs.